Quelle serait votre réaction si, un bon matin, votre fils/fille/autre précisez, venait vous annoncer tout sourire : « Papa, maman, je veux être backpacker ! » ?
En tout cas nous à la rédac de ClodoNews on réagirait, à l’instar de nombreux parents, de façon assez modérée. En effet, on serait à peu près comme ça : « Vas-y mon salaud ! Qu’est ce que t’attends pour baiser le système ? Va voyager gratos on va les niquer ces chiens de capitalistes« . Et on aurait raison ! Etre backpacker, cela signifie bien plus qu’une manière de voyager, bien plus qu’un mode de vie… Etre backpacker c’est un accomplissement, c’est l’accession au titre ultime : clochard routard.
Qu’est ce qu’un backpacker ?
L’interprétation littérale du terme backpacker, issu de la langue de Shakespeare, est la suivante : « backpacker » signifie « sac à dos – eur » ou, plus courrament « homme sac à dos« . Ca sonne quand même bien plus joliment en français.
Mais qu’est ce donc qu’un sac à dos-eur me direz vous ? Il s’agit tout simplement d’un étudiant en arts du cirque qui décide de faire une pause, bien méritée, dans ses difficiles études afin de se lancer à la découverte de notre vaste monde avec son baluchon sur le dos, son diabolo de jongleur dans les mains, ses espoirs naïfs dans la tête, son sarouel motifs éléphants immonde à la taille mais aussi, et surtout, son porte-monnaie vide. Oui vide putain ! Vous avez bien lu, l’homme sac à dos est un être rusé, il connait toutes les techniques de fourbe pour ne pas dépenser le moindre kopeck durant ses vacances.
Comment devenir un bon backpacker ?
Nous le savons très bien chers lecteurs de la clodosphère, voyager sans rien payer ça vous fait rêver hein pas vrai ? Et bien soyez heureux, ClodoNews vous apporte aujourd’hui ses secrets pour que vous puissiez vous aussi devenir un routard clochard :
1) Soignez Dégradez votre apparence
Si l’habit ne fait pas le moine, le sac fait pourtant l’homme sac à dos. Rendez-vous dans le Décathlon le plus proche et achetez le plus gros sac de randonnée que vous puissiez trouver. Le genre de baluchon Quechua plébiscité par les touristes allemands cinquantenaires ou les profs de SVT en vacances.
Vient ensuite le code vestimentaire. Rassurez-vous, il n’y à pas besoin de se casser la tête pour devenir un authentique backpacker, la seule règle à suivre : porter ce qu’il y a de plus moche. Un T-Shirt se voulant humoristique en représentant une marque de bière locale, un sarouel à motifs éléphants pour cacher vos gros jambons et le tour est joué. Pour ce qui est des cheveux, les dreadlocks sont une valeur sûre. Et même si, au final, votre voyage est annulé à la dernière minute, un tel look vous permettra toujours d’aller gratter quelques joints gratuitement lors des rassemblements de Philippe Poutou.

« Je m’habille comme les locaux pour être au plus proche de leur culture tu vois ? » – Léa durant son voyage au Laos… et en Thailande, et en Australie, et à Singapour et au Japon car le sarouel est une culture universelle.
L’homme sac à dos est un être simple, qui délaisse les attraits ostentatoires prétentieux afin de se concentrer sur les valeurs de la pureté du corps et de l’esprit. C’est donc tout naturellement qu’il parsème son corps de tatouages immondes à chaque pays qu’il visite. N’oubliez donc jamais d’ajouter un nouveau tatouage souvenir à chaque nouvelle destination découverte. Vous trouverez des tatoueurs très professionnels et éthiques dans les rues de la soif d’Asie du Sud-Est. Nous recommandons également les aiguilles au SIDA des tatoueurs sud-africains.
Dernier point, mais pas des moindres : l’odeur. Comme chaque homme, l’homme sac à dos est un animal social, qui, dans son objectif de quitter la société occidentale pour découvrir de nouvelles cultures, finit par se rassembler avec d’autres hommes sac à dos à l’autre bout de la terre dans des auberges de jeunesse miteuses. Et comme parfois, les signaux visuels ne suffisent pas à reconnaitre un autre backpacker, il faut alors faire confiance à son sens olfactif afin d’identifier vos camarades routards à travers toute une foule d’indigènes locaux. L’odeur de pieds fétides, de transpiration post-randonnée ou de weed locale sont généralement des signes qu’un backpacker se trouve dans les parages. Partez à sa rencontre.

Le bruit… et l’odeur
2) Négociez absolument TOUT ce que vous pouvez…
Voyager en ne dépensant à peine plus de 2€ par jours, voilà le vrai défi de tout vrai homme sac à dos. Dans une volonté de se démarquer de tous les autre moutons de touristes qui raquent leurs vacances à mort, le backpacker s’emploiera donc à respecter scrupuleusement les commandements suivants :
– Les hôtels tu éviteras, les dortoirs de 15 personnes avec chiottes turques communes tu privilégieras.
– Le code Wi-Fi tu exigeras dans chaque lieu que tu visiteras.
– Prendre le bus ou le taxi à 0.15 centimes d’euro tu t’abstiendras, seul le stop ou, à la rigueur, la location d’un vieux scooter sans freins tu t’accorderas.
– Négocier ton bol de sticky rice tu devras, une bagarre au street food tu entameras.
– Le paiement du massage happy ending tu esquiveras. Rossé par Jean-Tchang et son gang à coup de casque tu te feras.
– Tes techniques de pingre tu partageras sur les innombrables blogs de voyageurs et d’influenceurs avec photos et récits à la clé. Les clochards les plus aguerris tu impressionneras. Un financement participatif de ton voyage tu obtiendras.
3) …Et sortez votre caméra lors des situations tendues
Mais rappelez-vous, tout le monde n’est pas aussi calme que les français. Le flegme, la diplomatie et la tempérance légendaire que le monde nous envie, ne sont pas des valeurs universelles.
Il est fort probable que suite à vos négociations tout à fait légitimes. Le peuple autochtone, du fait de ses instincts primitifs, puisse se sentir frustré et agacé. Il exigera donc, à tort, châtiment pour l’attitude de l’étranger. N’y voyez pas de mal, l’occident est un territoire privilégié, les peuples du tiers-monde n’ont pas encore reçu notre éducation et n’ont pas les outils culturels pour comprendre la bienséance des backpacker et leur affection pour la gratuité. Car au fond la gratuité, c’est le partage, c’est l’amour. C’est donc à vous d’imposer votre idéologie aux locaux du pays que vous visitez. Ce qui peut parfois tourner au drame…
Ci-dessus, une très belle performance d’une femme sac à dos britannique et de son fils qui tapent leurs plus beaux sprints pour échapper aux lancers de cailloux et aux machettes de la folle du village.
Une situation qui résulte du fait que nos deux backpackers aient tout naturellement essayé de négocier le prix initial du thé proposé par cette népalaise passablement énervée : 150 roupies soit 1 livre sterling (une somme considérable tout de même !).
Heureusement justice a été rendue car, comme tout backpacker qui se respecte, notre touriste anglaise a tout de suite sorti sa caméra afin d’exposer au monde entier l’accueil déplorable des népalais. Tout filmer est un réflexe machinal, digne des hommes sac à dos les plus aguerris, qui permet de transformer toute situation à votre avantage. Nul ne doute que, après avoir fait le tour du web, la méchante népalaise a du trouver un autre travail afin de nourrir ses enfants tandis que les malheureux anglais, encore sous le choc, ont pu être rapatriés chez eux afin de se réconforter autour d’un bon Starbucks à 6€. Comme quoi, l’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs…
4) Poussez le vice jusqu’à mendier en pleine rue !
Le culot ça paye toujours ! Après tout, ne dit-on pas : qui ne tente rien n’a rien ? Alors vous aussi devenez mendiant et participez à la hausse des tensions sociales entre population locale et touristes étrangers en vous adonnant au « begpacking », contraction des mots anglais « beggging » (mendier) et « packing » (sac à dos), un terme désignant le comportement de certains touristes mendiant dans les rues de pays du tiers-monde afin de financer leur voyage.

Allez paye mon voyage j’te dis, paye le
Alors qu’attendez-vous pour ajouter la mention « sac à dos mendiant » sur votre CV d’homme sac à dos ? Ainsi que l’honorable mention « farang kee nok », soit « étranger crotte d’oiseau » en langue thaï. « Le begpacking c’est la vie hihi » comme dirait votre camarade de classe Chloé.

Jouer Wonderwall dans le métro de Bangkok ça a été ma plus belle expérience de vie hihi
5) Utilisez des enfants autochtones pour vos photos Instagram
Vos vacances d’homme sac à dos ne seraient pas réussies sans la touche finale : la photo en compagnie de petits enfants autochtones tout souriants.
Par effet de mimétisme avec tous vos amis partis faire 3 semaines de volontariat dans les trous les plus paumés de la terre, il vous faut vous aussi votre photo attendrissante avec les gamins pauvres du bidonville. Le but ? Récolter le plus de réactions sur vos réseaux sociaux en jouant sur la corde sensible de vos abonnés à coup de matraquage de sourires d’enfants.
Alors vous sortez dans la rue, vous prenez quelques mioches, tu me met quelques whites, quelques blancos, des sans-dents, 2-3 grains de riz et un petit Kirikou et le tour est joué ! Si il y a un petit handicapé ou manchot parmi eux c’est le Jackpot ! Ensuite, rassemblez les autour de vous (tout en gardant un œil sur vos poches, n’oubliez pas que ces gosses ne sont que des sales pauvres), souriez et prenez le cliché le plus mignon possible.

Ce sera une expérience bénéfique pour vous, pour votre image publique mais aussi pour les petits enfants qui, grâce à cette petite séance photo, auront pu faire une pause bien méritée après avoir passé la journée à fabriquer vos prochaines paires de Nike ou à extraire le cobalt des mines pour BMW et Apple.
Et puis, de toutes façons ces chiards sont toujours disponibles. Ils vagabondent dans la rue tels des enfants en libre service, on ne sait même pas à qui ils appartiennent donc autant s’en servir pour vos photos, ça ne mange pas de pain !

6) Faites une liste de phrases inspirantes à dire à vos amis à votre retour
« Ce sont des gens qui n’ont rien mais qui partagent tout« , » Ca change vraiment de notre société française matérialiste où tout le monde ne pense qu’à sa gueule« … Vous avez forcément déjà entendu ces phrases toutes faites lorsque votre pote Archibald le joueur de djembé est revenu de son « voyage initiatique » en Inde.
Et bien maintenant c’est votre heure de gloire ! Ce sera vous la star du prochain apéro qui aura l’incommensurable privilège de narrer son voyage sous les yeux admiratifs de vos potes. Préparez vos petites phrases sur vos expériences culinaires : « La Tiger et la bière Saigon c’est genre tellement meilleur que la Kro tu vois, moi je peux plus boire vos bières chimiques maintenant ahah« , « Le scorpion ? Ouais j’en ai mangé à Siem Reap, c’est juste des cacahuètes d’apéro en fait » ou bien vos petits poncifs de développement personnel : « Pour moi un vrai voyage c’est quand tu sors de ta zone de confort, c’est une quête de sens et d’identité, une initiation à des prises de conscience et des transformations. Un voyage intérieur plus qu’extérieur tu vois ?« .

Tes potes, toi et le look que vous garderez pendant 1 semaine pour montrer que vous revenez d’Inde
Si malgré tout nos conseils pour devenir un homme sac à dos de renom, vos amis ne vous accordent toujours pas d’importance, c’est que ce ne sont que des gros beaufs racistes et matérialistes, ou alors, c’est que vous n’êtes qu’une grosse victime, un pur produit de notre société individualiste qui vous fait croire qu’être backpacker c’est se construire soi-même par soi-même en s’instrumentalisant pour une recherche vaine d’identité.
A vous de voir…
.